
De l’importance d’un navire adapté à votre cargaison
October 11, 2023
Ecrit par Jarek Klimczak
Senior Risk Account Consultant, Marine Risk Management
Les premiers bateaux ont été construits au Néolithique et n’ont cessé d’être améliorés à travers les temps. Ils n’ont jamais été aussi solides et sûrs qu’aujourd’hui. Cependant, lorsqu’il s’agit d’assurer les navires et leur cargaison, les enjeux restent élevés.
Les assureurs maritimes assument de nombreux risques : la perte d’un navire ou de sa cargaison, les dommages à l’environnement, ainsi que la perte tragique de marins en mer. Pour répondre à la nécessité de protéger les intérêts des armateurs et des propriétaires des cargaisons, le secteur de l’assurance maritime a dû évoluer pour se moderniser. Pour autant, la décision d’une compagnie d’assurance de couvrir un navire et sa cargaison se prend le plus souvent à l’aune de la confiance qu’elle place dans le navire lui-même.
Une condition de couverture
Les propriétaires de marchandises ou les transitaires font généralement appel à un courtier (navire, fret ou affréteur) pour trouver un navire offrant le meilleur rapport qualité/prix. Les assureurs peuvent accompagner leurs clients dans cette démarche, à savoir trouver un navire de qualité adapté au transport de leurs marchandises.
L’assureur doit toutefois approuver le navire préalablement à la prise d’effet du contrat d’assurance couvrant le fret (en particulier les cargaisons spéciales). L’Institute Classification Clause (1/1/2001) exige que les cargaisons soient transportées par des navires construits conformément aux règles d’une société de classification donnée - membre ou membre associé de l’Association internationale de sociétés de classification (IACS) - cela permet de garantir que les navires ne sont pas trop vieux et qu’ils sont dûment entretenus. La clause prévoit également des exigences en matière de pavillon.
Nombre de secteurs - pétrole et gaz, énergie éolienne, mines, aérospatiale et construction - doivent confier à un(des) navire(s) adapté(s) le transport de quantités importantes de marchandises. Ces transports complexes nécessitent une planification minutieuse et les affréteurs doivent souscrire une assurance auprès d’une compagnie d’assurance éprouvée. Ainsi, certains fabricants de composants d’éoliennes dépêchent des ingénieurs de l’usine pour superviser et inspecter le processus de chargement et d’arrimage.
Faire des choix judicieux
Le choix du navire est une décision critique qui peut avoir un impact significatif sur toute entreprise. Qu’il s’agisse de transporter des marchandises à l’échelle internationale ou nationale, il est essentiel d’avoir une parfaite connaissance des types de navires à disposition ainsi que de leurs avantages et limites respectifs pour s’assurer que votre cargaison arrivera à bon port, et ce, en toute sécurité et toute efficacité.
Choisir le navire le plus adapté nécessite de prendre en considération un certain nombre de critères importants, à commencer par la nature de la cargaison elle-même.
S’agissant des entreprises dont le fret est conditionné en conteneurs, le choix du navire revient le plus souvent au transitaire, du prestataire logistique ou du NVOCC (transporteur public non-exploitant de navires). Les navires porte-conteneurs offrent des environnements sécurisés et contrôlés appropriés pour les cargaisons de grande valeur ou très fragiles. Pourtant, tout ne peut pas être expédié dans des conteneurs. Les vraquiers sont idéaux pour les matières premières telles que le charbon, les céréales ou le minerai. Les navires frigorifiques sont conçus pour transporter les denrées périssables comme les fruits, les légumes ou les fruits de mer.
Lorsque l’activité du transport maritime a atteint un pic pendant la pandémie mondiale, l’espace était limité, donc recherché. Certains expéditeurs ont alors choisi de confier leur cargaison au premier navire qui avait suffisamment de place pour assurer le transport. Les vraquiers ont commencé à transporter des conteneurs ou des matériaux spécifiques - des navires inappropriés tant en termes de qualité que de sécurité. Les pertes de cargaisons se sont multipliées et les différents acteurs en ont tiré un certain nombre de leçons.
Qu’il s’agisse de commercialiser des marchandises à l’échelle internationale ou nationale, il est essentiel d’avoir une parfaite connaissance des types de navires à disposition ainsi que de leurs avantages et limites respectifs pour s’assurer que votre cargaison arrivera à bon port, et ce, en toute sécurité et toute efficacité.
Navire adéquat
La vérification du caractère approprié du navire au vu de l’usage qui en sera fait peut s’avérer très facile ou nécessiter une exécution méticuleuse. Dans certains cas, il est indispensable d’avoir une connaissance directe des opérations et du transport maritimes.
Un excès d’informations ou, au contraire, un manque d’informations peuvent être tout aussi déroutants. Aucun critère pris séparément ne saura donner au souscripteur la certitude absolue que le risque est acceptable. Si un tonnage plus ancien n’est pas un critère en soi pour rejeter le risque, un mauvais entretien constitue assurément un critère de non-acceptation du risque. Les marchandises dangereuses sont généralement soumises à l’obtention d’une . Des consultants et des experts en risques liés à la qualité peuvent aider un souscripteur à évaluer le risque de la meilleure façon possible.
D’autres paramètres importants entrent également en jeu lors de l’évaluation de la qualité et du caractère approprié du navire au vu de la cargaison à transporter :
- Type du navire : Le type de navire peut prédéfinir la qualité. Les GNL/GPL/méthaniers/transporteurs de produits sont construits selon des normes très élevées et sont soumis à des exigences strictes, sous l’impulsion d’enquêtes régulières menées par les sociétés de classification et les compagnies chimiques/pétrolières (CDI/OCIMF).
- Âge : C’est un indicateur important de l’état du navire. Les navires plus anciens sont généralement en moins bon état et nécessitent davantage d’investissements et d’entretien.
- Dimensions/Taille : Les navires de plus grande taille peuvent supporter des conditions météorologiques plus difficiles, mais présentent un risque plus élevé en termes de collision/échouement dans des chenaux/rivières.
- Qualité de la société de classification : Les sociétés de classification surveillent l’état des navires au moyen d’une grande variété d’inspections, mais elles n’ont pas toutes le même degré d’exigence. L’Association internationale des sociétés de classification (IACS) est composée de 12 des plus grands organismes de classification et gère plus de 90 % du tonnage mondial. Pour ce qui est des 10 % restant, certaines associations n’offrent pas des normes d’inspection et de surveillance aussi élevées.
- Qualité du constructeur naval : Le constructeur doit avoir une expérience avérée dans la construction du navire selon les spécifications requises. Certains chantiers navals ont une très bonne réputation, d’autres pas.
- Qualité du Responsable Technique : La société qui assure la supervision technique (et, souvent pilote le navire) joue un rôle critique dans l’entretien du navire.
- Qualité du Pavillon : Cet indicateur est calculé à partir d’informations accessibles au public (dénommé pavillon blanc, gris et noir) : détentions et anomalies consignées dans le cadre du contrôle par l’État du port ; historique des inspections de l’AMSA et de l’USCG, anomalies et taux des détentions au cours des 5 à 10 dernières années ; historique du contrôle par l’État du port et des voies commerciales. Ainsi, il est possible qu’un navire qui cesse brusquement de faire escale dans certains de ces ports agisse de la sorte pour éviter les inspections très strictes du port par l’État.
- P&I Club : Principalement à des fins de subrogation, l’International Group (IG) of P&I Clubs donne l’assurance de la stabilité financière de l’armateur. D’autres P&I clubs peuvent être commercialement plus attractifs pour les armateurs, mais n’offrent pas nécessairement la même protection financière et la même gamme de couverture.
- Motoriste, nombre de moteurs et puissance totale : Certains types de moteurs sont plus susceptibles de tomber en panne que d’autres ; certaines cargaisons ou routes commerciales peuvent nécessiter des navires dotés de capacités de manœuvre et/ou de puissance spécifiques.
- Fréquence de changement de pavillon et/ou de classification : Des changements fréquents peuvent être le signe que le propriétaire ou le responsable technique cherche des conditions d’enregistrement plus faciles ou des règlementations plus souples.
- Historique des dommages/pertes : Certains services en ligne permettent de savoir si le navire a été impliqué dans des accidents graves ou mineurs.
Conclusion des enquêtes : un outil incontournable
Les enquêtes physiques sont la meilleure méthode pour évaluer le risque et l’aptitude d’un navire à transporter une cargaison spécifique.
Le dispositif d’inspection du navire se compose d’une partie obligatoire (légale et de classification) et d’une partie non obligatoire (sectorielle). La première inspection relève du cadre juridique international et était auparavant appliquée par les États du pavillon et du port, mais elle est désormais plus souvent effectuée par des organismes reconnus.
Les inspections sectorielles comprennent des enquêtes effectuées pour le compte de compagnies d’assurance, de clubs P&I, d’exploitants de terminaux, de propriétaires de cargaisons et d’armateurs. Ces inspections comprennent généralement les éléments suivants :
- Examen concernant le caractère approprié, qui détermine l’aptitude d’un navire à l’exploitation ou au transport de marchandises. tout sujet de préoccupation potentiel, le manque d’équipement et/ou de fonctionnalités requis pour des opérations spécifiques, et/ou l’aptitude au transport de marchandises.
- Examen de l’état du navire, qui rend compte de l’état de la coque et des machines d’un navire donné, de l’état des autres équipements, du statut de certification et du système de gestion.
Assistance technique
La technologie joue un rôle plus important dans la surveillance et l’évaluation des navires. L’analyse du comportement des navires en mer et l’accès aux données historiques peuvent aider à « faire l’état des lieux du navire ». Par exemple, deux navires identiques peuvent (apparemment) présenter le même niveau de risque. Cela étant, du fait que l’un emprunte une route maritime passant par le nord de l’océan Atlantique et que l’autre navigue dans des eaux tropicales plus calmes, ces navires rencontrent des conditions météorologiques sensiblement différentes.
Voici quelques éléments à prendre en considération :
- Nombre de jours passés en mer et zones concernées : Certaines routes maritimes sont caractérisées par des conditions météorologiques difficiles (Atlantique Nord en hiver ou eaux exposées aux ouragans/cyclones/typhons), ce qui peut entraîner une plus grande usure.
- Nombre de jours de désactivation du transpondeur AIS : Cela indique le moment où le transpondeur AIS (système d’identification automatique) du navire a été désactivé, ce qui peut indiquer la volonté de dissimuler la position du navire en raison d’activités illicites.
- Nombre de jours de dérive en haute mer : Cet indicateur peut pointer des problèmes de moteurs et de propulsion.
- Escales portuaires, nombre de jours passés dans les ports / jours en mer : Ces données fournissent des informations sur l’efficacité du port, le nombre de jours de planche des navires dans les ports et la fréquence des rotations. Les escales fréquentes et les courts séjours dans les ports suggèrent une fréquence élevée des rotations et une usure potentiellement plus importante. La probabilité que ces navires subissent un accident de navigation est plus élevée.
Divers services de notation des risques, outils sur mesure ou plateformes fournissent également des informations précieuses. SeaWeb, de S&P, fournit des données complètes sur plus de 200 000 navires. FleetMon et AISLive fournissent tous deux un outil interactif de suivi des navires.
Respectueux de l’environnement
Évaluer l’impact environnemental du navire et de la compagnie maritime que vous choisissez.
Ces dernières années, la question de la durabilité environnementale a gagné en importance dans le secteur du transport maritime. Certaines entreprises privilégient les pratiques respectueuses de l’environnement, comme les navires économes en carburant ou équipés de technologies de réduction des émissions. Faire le choix d’options plus vertes correspond aux objectifs de responsabilité sociale des entreprises et peut avoir un impact positif sur votre image de marque.
Bientôt, l’impact environnemental d’un navire deviendra une composante encore plus importante du processus de sélection. Depuis le 1er janvier 2023, il est obligatoire pour tous les navires de calculer leur indice de rendement énergétique (EEXI) afin de mesurer leur efficacité énergétique et de commencer à collecter les données pour la déclaration de leur indicateur d’intensité carbone (CII) opérationnel annuel et leur notation CII. Le CII mesure l’efficacité énergétique des navires de plus de 5 000 GT (jauge brute) transportant des marchandises ou des passagers. L’indice est exprimé en grammes de CO2 émis pour parcourir une distance d’un mille nautique en fonction de son chargement. Les CII seront gérés sur une base annuelle.
Le premier reporting sur les CII , sur la base des données de 2023, doit être effectué au plus tard le 31 mars 2024. Les navires recevront une note allant de A (très bien), B (satisfaisant), C (moyen), D (faible) ou E (très faible). Les seuils de notation deviendront de plus en plus stricts à l’horizon 2030. À l’avenir, certains ports pourraient ne pas accepter les navires dont la note est insuffisante ou leur imposer des frais d’entrée plus élevés – une raison de plus de prêter attention à la qualité des navires.
En évaluant minutieusement ces aspects et en travaillant en étroite collaboration avec des professionnels expérimentés du transport maritime, les entreprises peuvent s’assurer que leur cargaison arrive en toute sécurité et dans les délais impartis, tout en optimisant l’efficacité et la rentabilité.
Pour contacter l’auteur de cet article, merci de compléter le formulaire ci-dessous.
Plus d’articles
- Par famille de produits
- Par région
Liens directs
Ressources associées
- Tout afficher
Relever le défi de la transition : l’assurance des gigafactories en Europe
Mieux vaut prévenir que guérir : une nouvelle façon de gérer le risque de feux de forêt
¾ÅÉ«ÊÓÆµ en tant que régulateur, utilise des cookies pour fournir ses services, améliorer l'expérience utilisateur, mesurer l'engagement de l'audience et interagir avec les comptes de réseaux sociaux des utilisateurs, entre autres. Certains de ces cookies sont facultatifs et nous ne les installerons pas à moins que vous ne les activiez en cliquant sur le bouton "ACCEPTER TOUT". Vous pouvez désactiver ces cookies à tout moment via la section "Comment gérer vos paramètres de cookies" de notre politique en matière de cookies.